De profundis clamaviIntroduction Le poème De
profundis clamavi, composé par
Baudelaire, se situe au début du recueil
Les
Fleurs du Mal dans la section Spleen
et Idéal. Il s’apparente au Spleen.
Le titre signifie « j’ai crié des profondeurs » est
celui d’un psaume d’espérance de la Bible. Le poète
en a fait un chant de désespoir.
Thèmes abordés : - La mélancolie
- L’ennui et le vide, la fuite du temps
- Un tableau du Spleen
Lecture du poème XXX - De profundis clamavi
J'implore ta pitié, Toi, l'unique que j'aime, Du fond du gouffre obscur où mon coeur est tombé. C'est un univers morne à l'horizon plombé, Où nagent dans la nuit l'horreur et le blasphème;
Un soleil sans chaleur plane au-dessus six mois, Et les six autres mois la nuit couvre la terre; C'est un pays plus nu que la terre polaire - Ni bêtes, ni ruisseaux, ni verdure, ni bois!
Or il n'est pas d'horreur au monde qui surpasse La froide cruauté de ce soleil de glace Et cette immense nuit semblable au vieux Chaos;
Je jalouse le sort des plus vils animaux Qui peuvent se plonger dans un sommeil stupide, Tant l'écheveau du temps lentement se dévide!
Charles Baudelaire - Les Fleurs du Mal
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Analyse linéaire Il s’agit d’un sonnet irrégulier d’heptasyllabes aux
rimes embrassées pour les quatrains et plates pour les tercets. Les rimes
sont suffisantes (tombés, plombés) et pauvres (mois, bois). L’alternance
des rimes féminines et masculines est respectée.
Le ton est mélancolique. Le présent est un présent intemporel.
1er quatrain : Le vers 1 est une prière adressée à un « Toi » inconnu.
Ce « Toi » est mis en évidence à l’hémistiche
et est entouré de virgules. La majuscule montre que la personne à qui
il fait référence est sacrée. Mais le lecteur ignore qui
c’est.
La prière retombe au vers 2
à « gouffre obscur » « tombé ».
Le point insiste sur cette chute.
Aux vers 3 et 4, le poète commence à décrire l’univers
dans lequel il est tombé. Cette description continue dans le quatrain
suivant.
Au vers 3, « l’horizon plombé » stoppe tout espoir
de fuite ou d’élévation. On ressent également que
c’est un univers sombre.
Au vers 4, renforce le lieu sombre par « nuit », en parallèle
avec « gouffre obscur » (vers 2).
2ème quatrain : Ce quatrain est entièrement consacré à la description
de l’univers où se trouve le poète. C’est un véritable
tableau du Spleen.
Il insiste à nouveau sur l’obscurité du lieu où il
se trouve par l’
anaphore du mot « nuit » (vers 6 et 11).
Dans cet univers, le jour dure 6 mois sans apporter de chaleur et la nuit dure
6 mois également.
De plus, il s’agit d’un lieu froid
à « soleil
sans chaleur » (vers
5) ; « terre polaire » (vers 7) ; « soleil
de glace » (
oxymore)
(vers 10). On peut observer une gradation dans les termes.
Aux vers 7 et 8, on ressent le vide de ce lieu
à « nu » (vers
7) ; anaphore du « ni » au vers 8 qui insiste sur
ce manque. Ce vide était
déjà annoncé au vers 2 par « gouffre » et
au vers 3 par « morne »
à Gradation.
Au vers 8, on sent aussi le manque de vie.
à Normalement les descriptions s’ajoutent les unes aux autres alors qu’ici
tout s’annule.
1er tercet : Le « Or » introduit une notion d’espoir de changement mais
ce n’est pas le cas. N’a pas de valeur argumentative.
Ce monde horrible est à nouveau souligné par l’anaphore « horreur » au
vers 9.
Enjambement vers 9-10 souligne fuite du temps.
Vers 10 : froideur
Vers 11 : obscurité.
Il y a une redondance dans les termes descriptifs employés qui souligne
l’ennui et le vide. Le poème n’obéit pas à une
progression
2ème tercet : Le poète fait allusion à la mort dans ce tercet. La mort semble être
la seule issue possible.
Vers 14 chute mélancolique du poète. Souffrance due à l’ennui
et à la lenteur du temps qui s’écoule. « l’écheveau
du temps » est une métaphore qui fait allusion aux trois sœurs
Parques gardienne du temps et le mort qui déroulaient le fil de la vie.
Le fait que le poème se termine sur le terme « dévide » n’est
pas anodin. C’est un mot circulaire DE-vi-DE et l’on entend le
mot vide. Cette circularité représente l’enfermement du
poète. Cette métaphore est filée avec l’enjambement
des vers 9-10
à prolongement du temps.
Les
rimes plates des tercets soulignent l’ennui et le vide.
On constate tout au long du poème un appauvrissement des sonorités.
Dans les quatrains, les sonorités se répètent et se diffusent
dans le poème : « unique » (vers 1) à « univers » (vers
3) à « nuit » (vers 4) à « nuit » (vers
6) à « nu » (vers 7) à « ni » (vers 8).
Diffusion mais appauvrissement.
Conclusion Le paysage décrit par Baudelaire dans
De profundis clamavi pourrait être
celui de Saturne, planète vue comme étant la plus lente du Système
Solaire. De plus, dans la tradition littéraire, les poètes tourmentés étaient,
disait-on, nés sous le signe de Saturne.